lundi 15 août 2011

Le bonheur de Fuentes

Le bonheur des familles, Carlos Fuentes, Folio, 465 pages


Fuentes est un conteur et un écrivain. Ses exercices de style autour de quinze tableaux de familles improbables, imaginaires ou tellement réalistes sont autant de petites madeleines à savourer avec délectation. Fuentes est un conteur car non seulement on entend sa petite musique drôle ou tragique mais on entre dans le tableau d'une scène de genre. Et il n'est pas toujours facile de s'y faire une place quand Fuentes devient déroutant voir abscons. Il faut prendre un peu sur soi, sortir de la facilité et faire confiance au guide. À vous en reparler ça me donne déjà envie de le relire…

dimanche 14 août 2011

Un piano à Nuovaiocche

Willy Melodia, Alfio Caruso, Liana Levi, 536 pages.

S'appeler Caruso et raconter l'histoire de Melodia, ne voilà t-il pas deux bons présages ? Pas trop d'opéra dans ce roman paru à l'automne dernier chez Liana Levi et très peu de mélodie non plus si ce n'est le lamento d'un sicilien anonyme qui comme nombre de ses compatriotes traversera l'Atlantique s'établira à Nuovaiocche (joli comme nom pour New-York, non ?) et qui côtoiera les Luciano, Genovese et autre Costello qui ne faisaient pas dans l'opérette.
Ce n'est pas une énième histoire de la Mafia, c'est plutôt l'histoire intime d'un homme émigré contre son gré qui permet à l'auteur de décrire un monde "parallèle" revanche tragique à la misère. "Willy et son piano accompagnent la marche de l'histoire, en lui tournant le dos" conclue la 4ème de couverture. À lire absolument avant que cela en devienne un film.

Dolce Vita

Dolce Vita 1959-1979, Simonetta Greggio, Stock


Sur la couverture je télescope Dolce… Simonetta. Trop mythique "la dolce vita" !  Comment peut-on revisiter un tel monument (sic) du cinéma ? Comment  s'insérer entre Anita (Ekberg) et Marcelo (Mastroiani) ? Allons au fait, Simonetta Greggio est captivante. C'est une autre histoire de vie moins douce plombée par les Brigades rouges,  Cosa nostra où les intrigues du Vatican. C'est la "dolce vita" qui s'estompe au travers d'histoires parallèles qui flottent de 1959 à 1979 avec en trame de fond un mystère campé par le Prince Malo et le prêtre Saverio. C'est une fresque romanesque que dresse Simonetta Greggio avec sa part du charme magique qu'exerce l'Italie et qui court entre les lignes de ce roman.

lundi 25 juillet 2011

Câlins



Le petit livre des gros câlins, Kathleen Keating, Points, 96 pages.

Pour oursophiles. Amoureux des ours ou amoureux tout court, voici un livre à lire et à mettre entre toutes les mains. Un vrai "doudou".
Oursement vôtre.

La joueuse d'échecs


La joueuse d'échecs, Bertina Henrichs, Le livre de poche, 160 pages.



Éleni partage sa vie entre sa famille et sa place de femme de ménage dans un hôtel sur l'île Naxos, en Grèce. Jusqu'au jour où, en faisant tomber une pièce de jeu d'échecs, sa vie bascule.

Premier roman de Bertina Henrichs sur l'émancipation d'une femme affrontant les insulaires et sa famille, avec volonté mais discrétion.

À la recherche du Bonheur…


L'homme qui voulait être heureux, Laurent Gounelle, Pocket, 192 pages.

Sous la forme d'un conte, l'auteur vous propose de suivre pendant sept jours le cheminement intérieur d'un touriste occidental prenant conseil auprès d'un guérisseur balinais.

Partez à la quête du bonheur!

Alabama song ou la ritournelle des mots de Gilles Leroy.

Alabama Song, Gilles Leroy, folio, 224 pages
Prix Goncourt 2007

Papillon de nuit, oiseau libre. Zelda Sayre. Chacune de tes ailes est ocellée de petits cachous noirs. Jamais domptée. Jamais couchée. Caveçons inutiles. Tu voles. Tu voles et nous venges. Pas besoin de phaéton. Tu ne pérores jamais comme savait si bien le faire Scott au risque d'un mortel ennui. Tu es bucolique. Sans aucune retenue pour évoquer Joz, albatros splendide sur le fil de ton horizon amoureux. Joz qui avec tant de grâce danse et virevolte. Sur un air de ragtime ou sur un tango fougueux.

Abandonnée sous son aile grenue. Apaisée. Tes cothurnes sous le sable chaud. Perpétuelle dilettante. Nue ou dans ton tuxedo rose. Légère. Si légère. Fragile même. Ton amour, aussi profond que les abysses de la mer, ne tenait qu'à un fil, ganse d'or et d'argent. Ta rage de vivre, vieil atavisme des pionniers d'Alabama te dopait mieux que des myriades d'amphétamines. Ta crottée à l'esprit cinglant. Même si inexorablement l'écheveau de ta vie se déliait. Se délitait un peu plus chaque jour sous ta peau marmoréenne. Décatie bien avant l'heure. 

Aux frontispices des théâtres, petit papillon de lumière, comment te voir dans l'ombre de Scott ? Dans un noir si total. Absente, ignorée, blessée. Par la morgue insidieuse du héros déchu, puant, qu'aucune succube ne venait soulager. Tu rêvais pour lui de catafalque. Vite qu'on en finisse et qu'avec l'amadou partent en fumée, châteaux en Espagne, palaces dorés, rêves à jamais brisés. Ton alacrité s'est évanouie avec le fantôme de Joz. Plus de glance amoureux. Juste conchier les défaites, les nuits blanches sordides, les souillures avinées, les lupanars, les renoncements. Surtout les renoncements. Tant de solitudes croisées au cours de ces nuits pas si tendres. Tant de figures d'hommasses dans les remugles des sous-sols. Mélange pestilentiel de créosote et de foutre. Tant de rapins, tant de faiseurs de petite gloire. Loquedus infatués, poussahs plus prompts à guetter le pourliche qu'à comprendre quoi que soit à l'art "nouveau".

Scott t'a trompé, te trompe, et te trompera. Tu n'es rien. Tu n'existes plus. Même si tes droits sont forclos. Tu n'es rien. Ses mimiques simiesques pour t'humilier t’écœurent. Il s'enfonce et se noie dans le goulet de la mort. Personne n'entend plus sa voix de rogomme. Son aboulie le ronge lentement mais sûrement. Sa psychasthénie l'étouffe. Son aporie l'enferme. Relaps. Rien ni personne ne pourra le rédimer. Sauf peut-être les vestales appuyées aux péristyles des maisons d'édition qui n'ont d'yeux que pour son aura de comète. Reste un sordide mimodrame. Des chromos défraichis. Usés. Une petite musique aigrelette qui s’évanouit dans le lointain.

Sur la plage, blottie dans le giron de Joz Le Magnifique, tu caresses les nuages, tu tutoies les anges, tu lèches la pluie. Le jour efface la nuit. Le soleil te brûle. La mer monte. La mer descend. Et, toujours recommencé, ton rêve mirifique.